ARAMÉENS

ARAMÉENS
ARAMÉENS

On groupe, sous le nom d’Araméens, une confédération de tribus qui parlaient un langage nord-sémitique et qui, entre le XIe et le VIIIe siècle avant J.-C., occupèrent le pays d’Aram, région englobant des territoires assez étendus au nord de la Syrie. À la même époque, certaines de ces tribus, émigrant vers l’est et le sud-est, s’emparèrent de vastes territoires qui appartenaient à la Mésopotamie.

Les sources qui permettent de reconstituer l’histoire et la langue des Araméens sont de trois sortes: inscriptions archaïques trouvées au nord de la Syrie et qui remontent au XIe et au Xe siècle avant J.-C.; mentions qui existent dans les chroniques assyriennes de la même époque; mentions que l’on trouve dans l’Ancien Testament.

Langue impériale à l’époque perse, langue parlée par le Christ et ses premiers disciples, l’araméen joua longtemps un rôle de premier plan.

Histoire

Dans l’Ancien Testament, une tradition appuyée sur les généalogies des peuples (Genèse, XI, 28 et suiv.) et sur le conte de Jacob et Laban (Genèse, XXXI, 17 et suiv.) nous montre les Araméens étroitement apparentés aux Hébreux et ayant résidé, depuis l’époque des patriarches, c’est-à-dire depuis le XVIe siècle avant J.-C., environ, au nord de la Syrie, dans la région d’Harran. Si de nombreux spécialistes considèrent cette tradition comme anachronique, il est permis cependant de situer le berceau des tribus de langue araméenne là où l’Ancien Testament le place, c’est-à-dire dans le désert de Syrie (Qedem, «l’Est», Genèse, XXIX, 1). On peut penser que ces tribus, évoluant comme évoluèrent naturellement de nombreux autres Bédouins nomades, surgirent du désert, se fixèrent dans les contrées environnantes où le sol était cultivé et se mêlèrent aux peuples qui y étaient déjà établis. Il est fréquemment fait mention des Araméens dans les chroniques assyriennes. Ils sont considérés comme des pillards, en même temps qu’une autre peuplade, les Akhlaméens. Ceux-ci sont mentionnés pour la première fois dans une lettre que l’on fait remonter à peu près à 1375 avant J.-C., découverte à Tell el-Amarna et qui les situe sur l’Euphrate. Cinquante ans plus tard, ils atteignaient le cours supérieur du Tigre, mais étaient repoussés par les Assyriens. Au XIIIe siècle avant J.-C., ils sont attaqués par les Assyriens sur le fleuve Khabour et sur le cours moyen de l’Euphrate, où on les trouve établis. Les Araméens sont mentionnés pour la première fois par Téglath-Phalasar Ier, roi d’Assyrie (1115-1076 av. J.-C.), qui se flatte d’avoir ouvert contre eux et contre les Akhlaméens vingt-huit campagnes, sur un front s’étendant de Tadmor (Palmyre) à Anat et à Rapiqu sur le moyen Euphrate. À la fin du XIe siècle avant J.-C., les Araméens ont constitué l’État de B 稜t-Adini, des deux côtés de l’Euphrate, au sud de Karkhemish. Dans la vallée du Khabour, ils ont formé les émirats de Laqe, de B 稜t-Bahiani (Tell Halaf) et de B 稜t-Halupe. La tribu de Temanai s’est emparée de Nasibina (Nisibe), d’Huzirina et de Gidara au sud-ouest de Mardin (Kurdistan turc). Leur limite extrême de pénétration au nord est Suru dans les collines de T r-Abdin. À l’ouest de l’Euphrate, ils se sont infiltrés dans les montagnes d’Aman et se sont installés à Sam’al (Zincirli). Le Centre est tenu par l’émirat de B 稜t-Agusi avec Arpad pour capitale. Hameth est tombée entre leurs mains. Plus au sud, l’Anti-Liban est divisé entre les émirats de Zobah, dans les régions de Bequa’ (ne formant qu’un, peut-être, avec B 稜t-Rehob, sur la rivière Litani), de Maacah et de Geshur, à l’est de la Galilée, de Damas, enfin. Vers 1030 avant J.-C., une coalition de ces Araméens du Sud, conduite par Hadadezer, roi de Zobah, alliée aux Ammanites, aux Édomites et aux Araméens de Mésopotamie, menaça Israël. Mais David, en trois campagnes, en vint à bout. On dit que la Syrie tout entière lui rendit alors hommage. Le fils de David, Salomon (970-931 env. av. J.-C.), proclama lui aussi son hégémonie sur ces territoires à l’exception de B 稜t-Adini, et il semble bien qu’il ait occupé Palmyre, tandis que Damas, sous le règne de Rezon, échappait à sa domination. Les successeurs de Rezon, Ben-Hadad Ier et Ben-Hadad II (nommés Hadadezer dans les archives assyriennes), reprirent la lutte, mais Ben-Hadad II fut battu par Achab, roi d’Israël (874-853 env. av. J.-C.), qui conclut avec lui la paix.

La clémence d’Achab à l’égard de Ben-Hadad était due à son inquiétude devant la menace plus lourde de l’agressivité assyrienne. Au cours du XIe siècle, les tribus araméennes ne s’étaient pas bornées à occuper la Syrie. Elles s’étaient étendues le long de l’Euphrate moyen et de l’Euphrate inférieur, le long du cours moyen du Tigre et, plus loin, vers l’est, jusqu’en Babylonie, où un usurpateur araméen fut couronné roi de Babylone sous le nom d’Adad-apaliddin. Au IXe siècle, toute la région, de Babylone à la mer, se trouvait entre les mains des tribus araméennes connues sous le nom collectif de Kaldu (ou Kashdu) – les Chaldéens de la Bible. L’Assyrie se trouvait donc encerclée, mais Assur-Nasirpal II, roi d’Assyrie (884-859 av. J.-C.), prit l’offensive contre les Araméens et soumit, à l’ouest, B 稜t-Bahiani. Salmanasar III, autre roi d’Assyrie, annexa B 稜t-Adini en 856 et, en 853, combattit à Karnar contre les armées des pays d’Hamath, d’Aram, de Phénicie et d’Israël. La bataille fut indécise, mais, en 838, Salmanasar III réussit à annexer les territoires tenus par les tribus du moyen Euphrate.

Entre Israël et le royaume de Damas, après la mort d’Achab, guerres et trêves précaires se succédèrent pendant un siècle. Puis Téglath-Phalasar III, roi d’Assyrie, s’empara d’Arpad, centre de la résistance araméenne dans la Syrie du Nord, en 740 avant J.-C., conquit Samarie en 734 et Damas en 732. Finalement, la destruction de Hamath par l’Assyrien Sargon II en 720 marqua la fin des royaumes araméens de l’Ouest.

Sur le Tigre inférieur, les Araméens purent sauvegarder plus longtemps leur indépendance. C’est un Chaldéen, Merodach-Baladan, qui régna sur Babylone de 722 à 710 et qui réussit à contenir les assauts des Assyriens. À l’issue de la lutte cruelle qui suivit sa mort, les Assyriens, déportèrent 208 000 Araméens et, en 689 avant J.-C., ils rasèrent Babylone. Pourtant les Araméens ne s’avouaient pas vaincus; Babylone fut reconstruite et bientôt ils reprenaient la lutte. En 626, un général chaldéen, Nabopolassar, se proclamait roi de Babylone et s’alliait aux Mèdes et aux Scythes pour anéantir l’Assyrie. Au sein du nouvel Empire babylonien ou chaldéen, Chaldéens, Araméens et Babyloniens finirent par être confondus.

Écriture et langue

L’araméen est un langage sémitique, proche parent de l’hébreu et du phénicien. Mais qui comporte quelques traits communs avec l’arabe. Il utilise l’alphabet phénicien. Le premier spécimen d’écriture araméenne connu remonte au Xe ou au IXe siècle avant J.-C. et a été recueilli sur un autel à Tell Halaf. Il en existe de nombreux autres spécimens venant de Syrie et datant du IXe ou du VIIIe siècle, époque où l’araméen était utilisé à des fins religieuses ou politiques. Ces inscriptions montrent que l’araméen devenait déjà une langue littéraire. Au VIIIe siècle, il avait donné naissance à des dialectes divers, mais les gens instruits possédaient une langue commune assez répandue (II Rois, XVIII, 26-28). Les Assyriens eux-mêmes l’acceptaient comme seconde langue officielle. La déportation en masse du peuple araméen par les Assyriens et l’utilisation de cette langue en guise de sabir par les négociants babyloniens contribuèrent à la répandre. Pendant la période néo-babylonienne, elle était d’usage courant en Mésopotamie. Sous l’Empire perse (539-323 av. J.-C.), l’«araméen impérial» fut la langue officielle, de l’Égypte à l’Inde. Après les conquêtes d’Alexandre le Grand, le grec le remplaça dans cette fonction en Orient sur toute l’étendue de l’ancien Empire perse, mais les dialectes araméens survécurent jusqu’à l’époque romaine, et l’on retrouve dans les manuscrits certaines formes auxquelles on a donné les noms de palmyréen, de nabatéen, de samaritain et de syriaque. Certains fragments de l’Ancien Testament, par exemple ceux que l’on trouve dans Daniel et dans Esdras, ont été rédigés en araméen. Le Talmud de Babylone a été, dans sa plus grande partie, écrit en un dialecte araméen et le Talmud de Jérusalem en un autre. En Palestine l’araméen était le langage quotidien du peuple, l’hébreu étant réservé au clergé, aux fonctionnaires, aux membres de la classe supérieure. Jésus et les Apôtres parlaient l’araméen; en même temps que la Bible en hébreu ont circulé des traductions en araméen (Targums). L’araméen populaire n’a subsisté au cœur des temps modernes que dans quelques villages isolés près de Damas, dans les collines de T r-Abdin (Turquie du Sud-Est), enfin sur la rive orientale du lac Urmia (Iran, province d’Azerbaïdjan). Mais les communautés chrétiennes n’ont cessé de le pratiquer en Syrie orientale. On le retrouve dans la liturgie juive.

Culture et religion

Il est difficile de dégager des quelques fragments et objets d’art découverts par les archéologues les traits d’une culture spécifiquement araméenne. Les princes araméens, notamment ceux de B 稜t-Bahiani et de Sam’al, encouragèrent une forme locale d’art syrien fortement influencée par les Hittites ou les Mitannéens. Les Araméens, sans aucun doute, portaient, suivant les lieux, le costume de ces peuples. Cependant les artistes assyriens nous présentent sur les fresques de Til Barsip des Araméens semblables à des Bédouins. Et sur leurs sculptures, ils montrent les Araméens de Mésopotamie portant une courte jupe, barbus, enturbannés. Les femmes sont drapées dans de longs vêtements.

Bien que leur panthéon abritât des dieux cananéens, babyloniens et assyriens, les Araméens adoraient leurs propres dieux. Le principal était Haddad ou Ramman (le Rimmon de l’Ancien Testament), assimilé au dieu des tempêtes des Horites, Techoub. Le grand temple qui lui était consacré se trouvait à Damas. La principale déesse était Atargati (Astarté), qui rassemblait en sa personne deux divinités phéniciennes, Astarté et Anath. Son sanctuaire le plus important se trouvait à Hiérapolis, en Syrie. Les Araméens adoraient encore Sin, dieu babylonien de la lune, Nabu, dieu de la sagesse. Chamach, le dieu-soleil, El, le Cananéen, père de tous les dieux, Rechef, dieu de la guerre et de la foudre et bien d’autres encore. Il y a tout lieu de penser que Yau, c’est-à-dire Yaveh, figurait parmi les dieux adorés à Hamath.

Araméens
anc. tribus sémitiques (issues, selon la légende, d'Aram, fils de Sem) nomades de la Mésopotamie du Nord, qui, au XIIe s. av. J.-C., formèrent en Syrie et au Liban de petits états, ennemis des Hébreux. Les Araméens furent asservis par l'Assyrie au VIIIe s. av. J.-C. Leur dissémination assura la diffusion de leur langue, qui fut celle des Palestiniens au temps du Christ et resta celle du commerce au Proche-Orient (jusqu'à la conquête arabe).

Encyclopédie Universelle. 2012.

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